C'est en ces termes que le rabbin Samuel Lévi saluait l'oeuvre d'Anacharsis Cloots, "la République Universelle", que ce dernier publiait en février 1792 dans le bruit et la fureur de la Révolution française.
Anacharsis Cloots (Jean-Baptiste de son vrai prénom) est issu d'une famille d'aristocrates rhénans. Né en 1755, il s'installera en France en 1789, fervent défenseur des lubies révolutionnaires, il deviendra citoyen français et se fera élire à la Convention en septembre 1792.
"L'orateur du genre humain" fera partie de ceux qui voteront la mort du roi Louis XVI (exécuté le 21 janvier 1793).
Cloots ne lui survivra pas longtemps puisqu'il finira lui aussi sous la lame révolutionnaire le 24 mars 1794 après que Robespierre l'ait violemment pris à partie et accusé de "faire le jeu des puissances étrangères".
Anacharsis Cloots (1755-1794) |
Dans sa république universelle ainsi que dans sa suite directe Bases constitutionnelles de la République du genre humain (publiée en avril 1793) Cloots prône donc un monde sans frontière, libéré de "l'obscurantisme chrétien".
Car oui, Cloots est viscéralement antichrétien.
Il souhaite même que soit érigée une statue du curé athée Jean Meslier à l'intérieur de Notre-Dame de Paris transformée par les profanateurs révolutionnaires (voir l'Histoire du Vandalisme de Louis Réau et en particulier le chapitre concernant le "vandalisme jacobin" pour réaliser l'ampleur des méfaits commis au nom de la "liberté") en "temple de la Raison".
Jean Meslier, le curé athée... |
L'utopie mondialiste a toujours fraternisé avec le judaïsme (on a vu la réaction enflammée du rabbin Samuel Lévi) et de manière quasi symétrique s'est opposée au christianisme en général et à la religion catholique en particulier.
Pour Cloots, "la république universelle remplacera l'Eglise catholique" et le "genre humain est Dieu" (oui l'humanisme est une religion qui ne dit pas son nom, elle fait d'ailleurs bon ménage avec un panthéisme très en vogue actuellement et participant à cultiver l'image d'une Nature -avec un n majuscule- divinisée).
* Petit florilège d'extraits de La République Universelle et des Bases constitutionnelles de la République du genre humain :
- "je demande la suppression du nom Français, à l'instar de ceux de Bourguignon, de Normand, de Gascon."
- "c'est le genre humain régénéré que j'avais en vue, lorsque j'ai parlé du Peuple-Dieu dont la France est le berceau et le point de ralliement."
- "l'âge d'or reviendra quand le souverain régnera, quand l'erreur et la tyrannie ne morcelleront plus les domaines du souverain universel."
- "hommes de tous les climats, une vérité mère doit vous être continuellement présente à l'esprit, c'est que la révolution de France est le commencement de la révolution du monde."
- "brisez donc les moules de la tyrannie, rendez au souverain unique sa dignité première, et vous assurerez à jamais le bonheur de la France et de l'univers"
(Difficile de ne pas constater dans ce dernier extrait une transposition de l'univers kabbalistique d'Isaac Luria, ce ne sont plus les vases qui se brisent -chevirat haKelim-, mais "les moules de la tyrannie").
* On y retrouve également une inversion typiquement satanique, une ode à la débauche que n'aurait pas reniée un Sabbataï Tsévi :
- "Tâchons de nous élever à l'instinct des animaux, soumettons-nous aux lois invariables."
* Dans l'extrait suivant, on peut substituer l'expression "la république universelle" par "les droits de l'homme" afin d'obtenir une teinte plus actuelle... :
- "La République universelle remplacera l'Eglise catholique et l'Assemblée nationale fera oublier les conciles œcuméniques."
* Nous y lisons aussi l'expression d'un totalitarisme messianique, germe des futures dictatures communistes et nazies dont la Terreur révolutionnaire peut être considérée comme une
annonciatrice :
annonciatrice :
- "La souveraineté étant nécessairement despotique, gardons-nous bien de l'attribuer à toute autre puissance que le genre humain."
* Sans oublier un mépris de la création divine, thème ô combien gnostique (et judaïque... avec la nécessité de "réparer" le monde -voir concept du Tikkoun Olam-) :
- "eh bien, le globe que nous habitons est une île médiocre qui flotte autour du soleil"
Pour conclure, il ne faudrait surtout pas commettre l'erreur de voir en Cloots une espèce d'illuminé isolé.
Sa pensée et ses écrits sont l'expression d'une mentalité bien ancrée dans un monde du XVIIIe siècle profondément imprégné par le courant des Lumières (sur la réalité de ces dernières, voir impérativement les excellents travaux de Xavier Martin).
Il est essentiel de préciser que les Lumières sont elles-même le fruit de l'arbre kabbalistique qui a commencé à prospérer à partir de la Renaissance, lequel a contribué à lentement évacuer Dieu du cœur de la société pour faire place à un "Homme" divinisé et abstrait qui ouvrira la boîte de Pandore des pires totalitarismes.
Source principale :
Anacharsis Cloots, La République Universelle, L'insomniaque, Paris, 2014.
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